La CGT Malakoff Humanis

La CGT Malakoff Humanis

Télétravail selon la CGT

Projet de la CGT Malakoff Humanis_ Accord Teletravail

Dès le déconfinement en mai 2020, l’Ugict et les autres organisations spécifiques aux Ingés Cadres Techs dans la CGT ont décidé ensemble d’une grande campagne sur le télétravail.

Cela fait notamment suite aux publications de référence déjà éditées sur le sujet, à commencer par
un guide pour négocier de nouveaux droits en télétravail sorti des presses en septembre 2018 (à retrouver sur guideteletravail.fr) ;

L’enquête de grande ampleur « Le travail sous épidémie » menée via le site LutteVirale.fr avec l’apport d’experts de la Dares et la Dress qui offre une photographie unique du travail « en mode dégradé » pendant le confinement et la crise sanitaire du Covid-19.

Enjeux

Le télétravail, c’est oui… mais pas n’importe qui, pas n’importe quand, pas n’importe comment, et pas à n’importe quel prix !

  1. Évaluer 

Un bilan du télétravail tant en situation dite normale que durant le confinement doit être présenté dans les instances représentatives du personnel (CHSCT, CSSCT et CSE) ainsi qu’aux organisations syndicales dans le cadre de leurs prérogatives respectives.

  1. Négocier

L’objectif est de protéger des mal­traitances vécues pendant le confinement, pour assurer de bonnes conditions d’exercice professionnel et pour préserver la qualité du travail.

  1. Encadrer

Les diverses formes de travail à distance doivent être encadrées et suivies dans le temps. C’est du bon sens.

Les 10 conditions indispensables pour le télétravail

1. Nous voulons que toutes les dépenses soient réellement prises en charge

L’équipement informatique, les licences, les fluides (électricité, cartouches d’encre, abonnement Internet…), le matériel ergonomique de bureau, mais aussi les frais liés à l’utilisation des locaux (chauffage, participation au loyer, repas …) doivent être prises en charge par l’employeur.

La jurisprudence et le Code du travail sont clairs sur ce point : les télétravailleur.es doivent avoir les mêmes droits que les autres salarié·es. Pourtant, nombre d’employeurs utilisent le télétravail pour limiter leurs obligations. Ces dispositions doivent être précisées dans un accord d’entreprise (à défaut de branche), et figurer dans un avenant individuel au contrat de travail des télétravailleur·ses qui doivent redevenir obligatoires.

2. Nous voulons travailler moins, et pas à n’importe quelle heure

La règlementation en matière de temps de travail doit être appliquée : pour les salarié·es au forfait, comme pour celles et ceux qui sont en horaires collectifs, l’employeur est responsable d’organiser le décompte du temps de travail, de faire respecter les durées maximum de travail (10h/jour et 44h/semaine ou 48h exceptionnellement) et un minimum de repos (11h/jour +1 jour/semaine) et de garantir le paiement et/ou la récupération des heures supplémentaires.

Il faut un système de décompte du temps de travail, le paiement et/ou récupération de toutes les heures effectuées, et le déclenchement d’alertes en cas de dépassement des seuils.

Il faut une définition claire des plages horaires sur lesquelles nous devons être joignables. À noter parce que ça va mieux en le disant, ces plages horaires ne peuvent être supérieures à notre durée légale de travail ! (Sinon, on basculerait dans des astreintes…).

Les temps informels, d’échange, de socialisation… doivent être intégrés dans le temps de travail car ils sont indispensables au fonctionnement du collectif et à la qualité de nos productions. Pas question que le temps de travail ne se limite au temps strictement productif.

Ces dispositions doivent être précisées dans un accord d’entreprise (à défaut de branche), et figurer dans un avenant individuel au contrat de travail des télétravailleur·ses et doivent redevenir obligatoires.

De multiples études démontrent que le télétravail se traduit par des gains de productivité de l’ordre de 20 %. Le temps de travail augmente, en général sans être reconnu, et le travail s’intensifie (disparition des temps de pause et des temps informels…). Le télétravail doit s’accompagner d’une réduction du temps de travail pour que les gains de productivité réalisés grâce au télétravail profitent aussi aux salarié·es.

3. Nous voulons garder le contact avec nos collègues

Pour exercer nos métiers, le collectif de travail est indispensable pour croiser les points de vue, transmettre les expériences, nous coordonner, mais aussi exercer nos droits. Les luttes sociales nous ont permis de sortir de la relation individuelle (et totalement inégale) face à l’employeur et de gagner des droits d’organisation collective (droit de négociation, de grève, de réunion, d’information, de circulation des élus et mandatés dans l’entreprise, de se syndiquer…), pas question que le télétravail soit instrumentalisé pour y mettre fin !

Enfin, le caractère enrichissant de notre travail tient aussi au lien social, aux échanges avec les collègues, les usagers ou client.es… nous y tenons y compris en télétravail !

Le télétravail ne s’improvise pas, la priorisation des tâches, la communication à distance, l’organisation du travail à domicile engendrent de nouvelles règles.

La norme du télétravail doit être au maximum d’un mi-temps pour permettre au collectif de travail de se retrouver au complet.

Les télétravailleur·ses doivent avoir accès à toutes les informations de l’entreprise, et les syndicats et représentant.es du personnel doivent pouvoir leur envoyer des informations et les consulter par mail.

Le management doit être repensé pour avoir comme objectif la préservation du collectif de travail (organisation des réunions, de temps informels et conviviaux…).

Des formations pour les managers de proximité et tou·tes les salarié·es concerné.es doivent être mises en place.

4. Chacun doit avoir le choix, chacun s’organise comme il veut

Le télétravail ne doit pas pouvoir être imposé par l’employeur et doit toujours être réversible à la demande du ou de la salarié·e. Il doit y avoir des critères clairs et objectifs pour y prétendre liés à la nature des tâches à accomplir, pas question que ce soit le fait du prince et que cela devienne pour l’employeur un outil de chantage ou de «  récompense » des salarié·es !

L’objectif est de fixer un cadre collectif clair avec un nombre de jours maximum de télétravail par semaine et de laisser aux salarié·es la souplesse de choisir de télétravailler ou pas, avec un délai de prévenance.

Exceptionnellement, à l’occasion de pics de pollution ou de difficultés de transport, un télétravail peut être mis en place de façon occasionnelle, à condition qu’il y ait un accord (de branche ou d’entreprise) ou une charte d’entreprise.

Le télétravail doit être un moyen pour gagner de l’autonomie sur le contenu de son travail et sur son organisation. Le domicile étant un lieu privé, les systèmes de surveillance doivent être bannis (excès de reporting…). Les représentant.es du personnel doivent être consulté.es sur toute collecte de données, qui doit être limitée à un objectif concret et transparent et utilisée selon des règles claires, avec des délais de destruction des données.

Les représentant.es du personnel doivent être consulté.es sur tous les dispositifs de suivi et de contrôle de l’activité des télétravailleur·ses mis en place par l’employeur.

5. Nous voulons un vrai droit à la déconnexion et un meilleur équilibre entre vie pro et vie perso

Le fait de travailler sur son lieu de vie conduit à une absence de déconnexion entre vie privée et vie professionnelle. À moyen terme, le fait de ne pas pouvoir déconnecter de son travail est très dangereux pour la santé et pour la vie personnelle et familiale ! Rappelons que c’est l’employeur qui est responsable du respect du temps de travail et du temps de repos. À lui de prendre les mesures pour le garantir, pas question de faire culpabiliser les salarié·es !

Le droit à la déconnexion introduit dans le Code du travail grâce à la bataille de l’Ugict-CGT, doit s’appliquer au télétravail à travers des mesures concrètes :

  • Mettre en place de périodes de trêve des messageries professionnelles en dehors des horaires d’ouverture de l’établissement et au moins équivalentes au temps de repos.
  • Encadrer les conditions d’utilisation des outils de communication mis à disposition par l’employeur afin d’éviter les sollicitations professionnelles en dehors des heures de travail.
  • Les périodes où le/la télétravailleur·se doit être joignable doivent être précisées clairement et ne doivent pas dépasser le temps de travail des salarié·es concerné·es.
  • Afin de garantir le respect du temps de repos, décompter le temps de travail et évaluer régulièrement de la charge du travail. Les CSSCT et CHSCT doivent être informés et consultés sur les mesures prises par l’employeur dans le cadre de la prévention des risques pour les télétravailleur·es.
  • Mettre en place d’une commission de suivi de l’accord.

6. Nous voulons des garanties d’égalité entre les femmes et les hommes

Contrairement à l’idée souvent entretenue, le télétravail n’est pas forcément bénéfique aux femmes, au contraire. Impossible de télétravailler tout en gardant ses enfants !

En télétravail comme en présentiel, les employeurs doivent mettre en place des dispositifs de réduction du temps et de la charge de travail pour les personnes en charge de personnes dépendantes (enfants ou personnes âgées), des droits à congé enfant malade et un droit à souplesse sur l’organisation des horaires.

Les femmes enceintes doivent avoir un droit opposable au télétravail, dès l’annonce de leur grossesse, avant leur congé maternité.

Prévenir les violences sexistes et sexuelles :  chaque année 220 000 femmes sont victimes de violences conjugales, or, en cas de télétravail, ces violences ont lieu sur le temps et le lieu de travail.

Dans ce cas l’employeur doit donc, comme le prévoit la convention 190 de l’OIT :

  • Prévenir : intégrer les violences intrafamiliales dans le Document unique d’évaluation des risques (DUER), mettre en place un dispositif de signalement une information systématique de tou·tes les salarié·es (heure annuelle de sensibilisation et remise d’une brochure complète), former de l’encadrement à la détection de ces violences.
  • Protéger : donner droit à des absences rémunérées dès le signalement des violences, garantir la mobilité géographique et fonctionnelle, autoriser la démission sans préavis, pouvoir déclarer des violences comme accident du travail, prendre en charge des frais judiciaires et médicaux.

7. Nous voulons repenser et réorganiser le management

Les managers ont tenu la barque durant le confinement. Aucune raison pour qu’ils n’y arrivent pas au travail. Pour la CGT, il convient de les accompagner parce que le télétravail nécessite une relation de travail basée sur la confiance et une plus grande autonomie dans l’organisation de son travail.

Pour cela il est important de :

  • former le management de proximité à cette nouvelle organisation afin de préserver le collectif de travail et les interactions entre les différents acteurs. ;
  • limiter le nombre de jours de télétravail, sauf situation exceptionnelle ou publics particuliers (handicap, femmes enceintes…) ;
  • revaloriser le rôle, l’autonomie et les moyens des ressources humaines de proximité.

L’entreprise doit s’attacher à développer un management vertueux.

8. Nous voulons des lieux de travail adaptés

Le télétravail est souvent l’occasion de repenser l’organisation des lieux de travail. Mais pas question qu’il s’agisse de faire des économies de m² sur le dos de nos conditions de travail !

Un poste de travail doit être maintenu pour chaque télétravailleur·se dans son entreprise ou administration. Avec la crise sanitaire, les open space gigantesques et organisations en flex office ont démontré leur caractère pathogène : il est temps de mettre fin à ces lieux de travail déshumanisants.

Les espaces de travail doivent être conçus avec celles et ceux qui les occupent.

Tout lieu de travail doit respecter les normes d’ergonomiques : surface par rapport au nombre de personnes, écran adapté, isolation phonique, etc.

Les frais liés au lieu de travail doivent être pris en charge par l’employeur.

Il faut développer des tiers-lieux, financés par l’employeur, pour permettre le télétravail en dehors du domicile.

Accès du lieu de travail aux syndicats, IRP et à l’inspection du travail avec l’accord et prévenance du télétravailleur·se (lieu indiqué dans la convention ou l’avenant).

9. Nous voulons des droits spécifiques en cas de problèmes de santé

Le télétravail peut faciliter l’accès ou le maintien dans l’emploi de personnes en situation de handicap (fatigabilité, suivi des protocoles de soins, traitement incompatible avec la conduite et difficulté de déplacement en transport en commun, etc.), mais également en cas de « handicap temporaire » : pour les reprises en temps partiel thérapeutique, le télétravail peut être une mesure d’adaptation de poste permettant d’éviter une déclaration en inaptitude et un reclassement – voire pire -.

Ceci doit être travaillé en lien avec la médecine du travail.

Mais attention, dans tous les cas il faut aussi tenter de trouver des solutions en présentiel et le télétravail ne doit pas se substituer à un arrêt maladie ou à des congés enfants malades.

10. Nous voulons des mesures de protection quelle que soit notre situation ou notre statut

En cas de dommages, vol, incendie, protection des données sensibles, les télétravailleur·ses doivent être assuré.es.

L’employeur est responsable de la santé et sécurité des salarié·es. C’est donc à lui de souscrire une assurance pour couvrir les risques liés au travail à distance sous toutes ses formes y compris pour les salarié·es nomades ou en déplacements ponctuels.

 

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